Dans un jugement oral rendu le 24 juillet 20201, la Cour supérieure reproche au juge de première instance de n’avoir pas donné l’occasion aux parties – non représentées – de vider une question constitutionnelle.
Dix résidents de Saint-Cuthbert (ci-après « Voisins ») ont poursuivi DGNE (propriétaire de l’aérodrome voisin, soit Saint-Cuthbert CCU2) aux petites créances (division de la Cour du Québec), alléguant une diminution des valeurs foncières due au bruit des aéronefs.
DGNE a soulevé la compétence fédérale en matière aéronautique, entre autres moyens de défense. Les Voisins, eux, ont invoqué des lois provinciales : le Code civil du Québec en ses articles 976 (troubles de voisinage) et 1457 (responsabilité extracontractuelle pour faute), et l’article 20 de la Loi sur la qualité de l’environnement (émission d’un contaminant, le bruit en l’occurrence).
La Cour du Québec2 a donné raison aux Voisins, appliquant en leur faveur les textes provinciaux sans considérer l’incidence du droit constitutionnel ou du droit fédéral, et condamné DGNE à payer des dommages-intérêts de plus de 145 000$ au total.
En révision judiciaire, la Cour supérieure conclut à l’insuffisance des motifs du jugement de la Cour du Québec quant aux aspects constitutionnels du litige (partage des compétences fédérales et provinciales). Elle estime aussi que le premier juge aurait dû suspendre le procès pour que l’on puisse mettre en cause les procureurs généraux du Québec et du Canada. Ceux-ci auraient ainsi pu faire valoir la position des ordres de gouvernement concernés.
Le premier jugement est donc annulé, mais ce n’est pas forcément la fin de l’histoire : les débats pourraient reprendre devant la Cour du Québec avec la participation des procureurs généraux. À suivre!
1 Dossier 705-17-008492-181; la version écrite des motifs est attendue avant l’automne.
2 Dans Thériault et autres c. Gestion DGNE, 2018 QCCQ 10264.
Une contribution de Elizabeth Cullen et Samuel Bachand, PFD Avocats
Photo : Jean-Pierre Bonin