Infolettre

4 mars 2019

vol. 4,  no 5

 

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Le respect, ça se manifeste!

 

Après des années d’austérité néolibérale qui ont affecté grandement les femmes, 2017 et 2018 ont été déterminantes pour le mouvement féministe partout dans le monde, notamment en raison de l’ampleur et de l’impact de la vague #moiaussi. De plus, la sous-représentation des femmes dans les sphères décisionnelles, les commentaires méprisants sur leur corps et leurs vêtements, la place qu’occupe la charge mentale chez les femmes, les abus commis à l’endroit des femmes autochtones sont autant de sujets qui ont occupé l’espace médiatique au cours des dernières années. Il est grand temps que soient faits certains gestes concrets en faveur de l’égalité et des droits des femmes.

Le slogan de la journée des femmes, le 8 mars, Le respect, ça se manifeste, se veut intemporel. Le mot « respect », central dans le message, est riche et peut être décliné de multiples façons. L’invitation à « manifester » son respect est un appel à l’action qui peut être compris tant sur le plan individuel que sur le plan collectif. Elle fait également référence aux manifestes politiques qui ont, ici comme ailleurs au cours de l’histoire, marqué les sociétés.

Écart salarial entre les hommes et les femmes -
que nous disent les statistiques?

 

L’écart de salaire est maintenant de 3 $ l’heure en faveur des hommes, nous révèle l’Annuaire québécois des statistiques du travail publié par l’Institut de la statistique du Québec. Au cours des dix dernières années, cet écart était toujours demeuré sous la barre des 3 $.

 

On constate que les femmes ont gagné environ 90 % du salaire horaire des hommes au cours des dix dernières années. Cet écart ne correspond pas nécessairement à une dégradation de la rémunération des femmes, mais il permet de constater qu'il n'y a eu aucune amélioration.

 

Parmi les facteurs explicatifs de l’augmentation de l’écart salarial, on note la progression du travail autonome ou temporaire chez les femmes et le nombre plus restreint d’heures travaillées par celles-ci. En effet, le travail autonome était en progression de 12,6 % chez les femmes et en recul de 4,1 % chez les hommes. Le nombre d’hommes employés a augmenté de 12,1 %, tandis que ce nombre était de10 % chez les femmes.

 

Au cours de la décennie, la progression de l’emploi temporaire a été de 16,1 % chez les femmes, et de seulement 4,7 % chez les hommes. De plus, les femmes ont travaillé en moyenne 32,2 heures par semaine en 2018, tandis que les hommes en ont travaillé en moyenne 36,7. Qui plus est, les femmes ont dû s'absenter plus d’heures pour maladie ou obligations familiales. On sait que ce sont généralement les femmes qui assument les obligations familiales de fin de journée : devoirs, souper, soin des enfants. Ce sont elles qui essaient de concilier travail-famille et de composer avec la culpabilité qu'occasionne aux parents le fait de laisser des étrangers s’occuper des enfants 10 à12 heures par jour. En cas de maladie, de fermeture d'école ou de tempête de neige, c’est en général la mère de famille qui reste à la maison. Déléguer ces tâches à des gardiennes serait non seulement trop coûteux, mais ajouterait à son sentiment de culpabilité. Ces questions affectent la vie professionnelle et personnelle des femmes bien au-delà du congé de maternité.

La désaffection des femmes pour les sciences « dures »
au Québec : 

contre le fatalisme et le statu-quo

 

Peut-être que c’est l’époque qui veut cela, mais on tombe des nues en constatant que la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes s’est transformée, au fil du temps et pour beaucoup, en « Journée de la femme » que l’on souhaite à tout une chacune, comme la Saint-Valentin, le fête des grands-mères ou les poissons d’avril. Cette dérive est d’autant plus préoccupante que la lutte pour les droits des femmes est loin d’être aboutie, partout dans le monde et dans de multiples domaines. Le présent texte se penche sur la sous-représentation des femmes dans les sciences, de même qu'à ses causes et conséquences possibles.

Un premier constat : les femmes occupent une place croissante, mais toujours marginale dans les sciences « dures » au Québec, ainsi qu’en génie et en informatique.

Pour se donner une idée documentée du phénomène, voici quelques statistiques concernant le pourcentage de femmes parmi les professeurs-chercheurs du Québec en sciences appliquées et en sciences pures :

 

1999-2000

2006-2007

2010

Sciences appliquées

10.5%

14.5%

16.1%

Sciences pures

13.1%

17.5%

20.1%

Source : Ministère de l’Économie, de la Science et de l’Innovation
 

 

 

On peut également se référer aux statistiques du rapport « Progression des femmes en sciences au Québec – 2004/2011 », publié par le Ministère de l’Économie, de la Science et de l’Innovation du Québec, qui indique que de 2004 à 2011, le pourcentage de professeures-chercheuses en sciences pures et appliquées est passé de 15.8 à 17.6 (une faible progression pour un faible pourcentage), tandis que le pourcentage de diplômées a reculé de 0.6 point pour passer de 34.3 % en 2004 à 33.7% en 2011.

Pour sa part, l’Ordre des Ingénieurs du Québec (rapport annuel 2016-2017) constate que – bien qu’en progression - le nombre de ses membres féminins reste encore faible, lui aussi : 14.3% en 2016-2017, contre 14% en 2015-2016.

Un deuxième constat : le financement par le Canada des recherches menées par des femmes est proportionnellement moindre que celui des recherches menées par des hommes, en particulier quand l’examen de la demande de subvention porte sur la personne responsable du projet plutôt que le projet lui-même.

Il en va ainsi des recherches en santé, écrit Sheryl Ubelacker : « lorsque les évaluations reposaient principalement sur le leadership et l'expertise du chercheur principal, l'écart entre les sexes était de quatre points de pourcentage, les 

hommes profitant de meilleurs résultats que les femmes dans l'obtention de subventions pour leurs recherches ». Quatre points de pourcentage, cela peut sembler négligeable, mais il ne faut pas oublier que seuls 16% des projets sont subventionnés, et qu’il s’agit du domaine de la santé, où les femmes sont mieux représentées qu’en informatique, en génie ou en mathématiques. Ian Bussières écrit quant à lui – en 2019 – que « selon l’Institut de recherche en santé du Canada, qui a analysé 24 000 demandes de subvention en cinq ans, 15 % des demandes présentées par des hommes ont été acceptées contre seulement 9 % pour celles déposées par des femmes ».

 

Gwenn Scheppler

 

Soirée discussion :
appréciation étudiante et
évaluation de l’enseignement

De nombreux membres ont participé avec enthousiasme à une Soirée Bulles qui s'est tenue le 27 février dernier au café Satellite du pavillon Jean Brillant. La soirée, magnifiquement organisée par l'équipe de la vie syndicale, avait pour thème : appréciation étudiante et évaluation de l'enseignement. Trois conférenciers ont d'abord exposé leurs points de vue : Jonathan Leblanc, avocat et conseiller syndical à la FNEEQ, Frédéric Lapointe, chargé de cours et conseiller en évaluation au Centre de la pédagogie universitaire, et Pierre G. Verge, président du SCCCUM. Françoise Guay, vice-présidente à la vie universitaire, a ensuite animé une discussion.

 

Pierre G. Verge a affirmé que si les personnes chargées de cours, toujours soucieuses d'améliorer leur enseignement, sont heureuses de prendre connaissance des commentaires appropriés des étudiants-es sur l'enseignement, elles n'en sont pas moins inquiètes de l’utilisation qu’on continue de faire des résultats de la démarche d'appréciation de fin de trimestre dans les unités, cela à l'encontre de l'esprit et de la lettre de l'article 12 de notre convention collective. Il a fait ressortir les biais de la démarche et réaffirmé que les étudiants-es ne peuvent évaluer leurs maîtres, cela non seulement parce qu'ils ne disposent ni des outils ni des connaissances nécessaires, mais aussi parce qu'ils et elles se trouvent en conflit d'intérêts. Enfin, il s'est inquiété que ce que l'utilisation abusive de la démarche d'appréciation étudiante ouvre la voie à un certain clientélisme exerçant des pressions sur les enseignants et puisse en conséquence nuire à la qualité de l'enseignement supérieur.

 

Me Jonathan Leblanc a analysé la question de l’appréciation étudiante d'un point de vue juridique. Il a rappelé que le pouvoir d'évaluer son personnel fait partie du droit de gérance de l'employeur, et que les conventions collectives et la Charte des droits encadrent l'exercice de ce droit. Il a distingué les contextes (disciplinaire et administratif) dans lesquels on utilise l’appréciation des cours, puis soulevé quelques problèmes de cette démarche : ses biais d'appréciation, qui peuvent aller jusqu'à la

discrimination, le ouï-dire, l'anonymat et le traitement des résultats quantitatifs. Se penchant sur la possible contestation de la démarche d'appréciation en cour, il a exploré les questions de fiabilité de la preuve et de valeur probante de la preuve.

Frédéric Lapointe s’est proposé de répondre aux inquiétudes et aux questions soulevées par les deux conférenciers qui ont parlé avant lui. Il a souligné que les évaluations des prestations de l’enseignement permettent de relativiser les plaintes reçues par les directeurs et les directrices de départements et de civiliser les évaluations sauvages du type « ratemyteacher ». Il a aussi rappelé que les chargés-es de cours sont propriétaires des commentaires reçus de la part des étudiants et que la direction du département ne les reçoit pas. Le conseiller du CPU s'est ensuite voulu rassurant sur la méthodologie de la démarche d'appréciation.

Il a parlé de l'absence de discrimination, de même que des taux de participation, de la nature d'un cours donné comme influant ou n'influant pas sur les résultats, des variations dans les échantillons, des moyennes, de la valeur globale des données et de leur interprétation. Il a affirmé que si les « chiffres » n'étaient pas parfaits, ils étaient très « solides » et que les enseignants devraient y réagir. Il a aussi rapporté que la cueillette en ligne n'avait eu aucun effet défavorable aux personnes chargées de cours.

Au cours de la discussion qui a suivi, les membres présents-es ont échangé entre eux et avec les conférenciers sur les questions soulevées par ceux-ci : le caractère anonyme des évaluations, la nécessité de ne plus inclure les questions portant sur la prestation des auxiliaires sur le même formulaire que l’évaluation de la personne chargée de cours, le lien entre les résultats des étudiants-es et leurs appréciations, la préparation de l’étudiant-e à la démarche d'appréciation, le clientélisme, les perceptions de la démarche d'appréciation par les plus jeunes et par les plus vieux, les attentes des étudiants en matière d’entertainment, sur le soutien formatif, etc.

Bref, la soirée a été plus qu'intéressante, très réussie et savoureuse, grâce à un vins et fromages fort apprécié de toutes les personnes présentes!

Perspective juridique sur l’appréciation de l’enseignement
par les étudiants-es

 

Depuis l’été 2018, le monde universitaire canadien remet en question l’utilité de l’« évaluation » de l’enseignement par les étudiants-es en tant que mesure fiable de la performance du personnel enseignant, surtout si cette démarche d'appréciation sert à l'accès aux promotions ou au renouvèlement des contrats des enseignants-es.

 

Dans le cadre d’un différend entre l’Université Ryerson et son association du personnel académique, l’arbitre William Kaplan a ordonné à l’Université de ne pas utiliser les résultats d'une telle « évaluation » pour décider de l'attribution des promotions ou pour embaucher des professeurs-es.

 

William Kaplan a basé sa décision sur plusieurs études et témoignages d’experts (signés, entre autres, par le statisticien Phillip B. Stark et par le directeur du centre d’enseignement et d’apprentissage à l’Université de Californie à Berkeley, Richard Freishtat), qui avaient souligné des lacunes méthodologiques et éthiques dans le processus dit d’évaluation. En effet, les résultats seraient faussés par une longue liste de facteurs, y compris des caractéristiques personnelles (telles que la race, le sexe, l’accent, l’âge et l’attractivité physique) et les caractéristiques du cours (taille de la classe, matière, enseignement traditionnel par rapport à une pédagogie innovante, etc.). 

 

Sophie Quigley, professeure en sciences informatiques à l’Université Ryerson et agente des griefs, est d’avis qu’au début des années 2000, il n’existait pas d’études sérieuses sur l’utilisation de « l’évaluation » par les étudiants-es, et que les universités ont conféré à celle-ci un caractère officiel et une autorité certaine. De plus en plus d’études rigoureuses commencent pourtant à paraître et il serait temps de remettre en question cette pratique.

 

Quel sera l’avenir de l’évaluation de l’enseignement, maintenant que nous connaissons les effets pervers de l'appréciation étudiante? Tout en n’écartant pas complètement l’utilité de sonder les étudiants par des questionnaires, William Kaplan mentionne les évaluations par les pairs-es et les dossiers d’enseignements comme indicateurs plus fiables quand il s’agit d’évaluer le rendement de l’enseignement ou de veiller à la qualité de celui-ci.

 

 

 

À très bientôt!

Dans environ un mois, une autre Soirée Bulles aura lieu sur un thème aussi fascinant. Soyez à l'affût de son annonce!

 

 

Grève générale à la TÉLUQ


La présidente du Syndicat des tuteurs et tutrices,
Nancy Turgeon, nous rend visite.

 

Alors que les professeurs-es créent les cours à distance offerts par la TÉLUQ, les tuteurs et tutrices sont les enseignants-es qui veillent à l’ensemble de l’encadrement et du suivi pédagogique individualisé. Ils et elles sont des diplômés supérieurs, hautement qualifiés et très expérimentés en enseignement à distance. Malheureusement, contre une direction qui cherche à dévaloriser leur travail pour de douteux motifs budgétaires, les tuteurs et tutrices doivent depuis longtemps batailler pour la reconnaissance de leur statut professionnel d’enseignants-es. La lutte est aussi âpre que le mépris de la direction pour leur statut est grand : la TÉLUQ poursuit en diffamation la présidente du STTTU-CSN pour avoir affirmé dans les médias que ses membres étaient des « enseignants et enseignantes »!

La TÉLUQ cherche à remplacer les tuteurs et les tutrices par tous les moyens, même les plus indignes. Non seulement elle a sous-traité l’enseignement des programmes de langues à des employés-es de l’Institut Matci, une entreprise privée, dépouillant du jour au lendemain 20% des tuteurs et tutrices de leur travail, mais elle a négocié avec le Syndicat des professeurs-es la création d’une nouvelle catégorie d’emploi, les professeurs-es sous contrat, devant pour le faire réduire le service dispensé aux étudiants-es. Elle a transféré à ces faux professeurs-es précaires, sous contrat pour un ou deux ans, le travail de très nombreux tuteurs et tutrices.

Soutenons nos camarades tuteurs et tutrices


Les tuteurs et des tutrices de la TÉLUQ ont dénoncé leur situation au moyen de manifestations, de recours juridiques, d’appuis des syndicats et de la FNEEQ, d’interventions médiatiques et d’interventions à l’Assemblée nationale. Malgré tout, la négociation se trouve dans une impasse : la TÉLUQ demande même aux tuteurs et tutrices d’accepter des reculs salariaux en raison du contexte déficitaire, tout en continuant à dépenser sans compter pour embaucher des professeurs-es.

Cette situation doit nous préoccuper au plus haut point. En effet, la multiplication des statuts d’emploi peut menacer tous les syndicats de chargés-es de cours. Il faut être solidaires avec nos camarades, et affirmer haut et fort, avec le STTTU-CSN, qu’inventer de nouveaux titres d’emploi pour contourner les enseignants-es d’expérience et nos conventions collectives est inacceptable.

Continuons de soutenir avec énergie le STTTU-CSN!

 

Photo : Mir Franc SCCCUM

Bonne période d'activités libres!

 

Bien sûr, l'Université n'est pas fermée pour l'hiver! Mais il faut bien avouer que, par certains petits matins glacés des dernières semaines, il nous est arrivé de rêver qu'elle le soit, n'est-ce pas? Plus sérieusement, nous vous souhaitons que la semaine d'activités libres qui commence vous soit l'occasion de souffler dans le rythme effréné de ce trimestre, de terminer des corrections, de faire des lectures enrichissantes pour votre enseignement, de peaufiner une stratégie pédagogique ou de préparer un projet de votre cru.

Les bureaux du SCCCUM restent ouverts toute la semaine. Vous pouvez nous appeler ou nous écrire. C’est avec plaisir que nous répondrons à vos questions.

 

Dates à retenir

 

Activités universitaires

Du 4 au 8 mars - Période d'activités libres

11 mars à 9 h - Date limite pour soumettre un dossier pour le prix d'excellence à l'enseignement

Du 11 au 15 marsSemaine de prévention des violences à caractère sexuel

18 mars - Assemblée universitaire

25 mars - Conseil de l'Université

 

Activités intersyndicales

8 mars - Journée internationale des femmes

13 et 14 mars - Conseil confédéral CSN

15 mars - Grève mondiale pour le cllimat