Voici quelques pensées personnelles dont j’ai fait part au conseil d’administration au courant des derniers mois pour lancer une réflexion.
Je respecte profondément tous les leaders et tous les organismes qui ont diffusé ces types de communiqués depuis quelques mois, mais je me suis demandé pourquoi il fallait attendre un tel désastre aux États-Unis avant d’agir ici.
Il y a eu des exemples notables ici à Ottawa dans les derniers temps où des leaders ont pris le taureau par les cornes lorsque le racisme a fait surface dans leur institution. Malgré bien des progrès accomplis, on a trop de situations de discrimination raciale et systémique ici au Canada, dans notre province, dans notre ville et même dans notre propre communauté où on ne dit rien et on ne fait rien.
Il y a bien des façons de tenir un genou sur le cou d’un peuple pour l’étouffer. Chaque fois qu’une institution n’est pas proactive dans l’embauche ou la promotion de gens qualifiés de la francophonie dans toutes ses expressions, elle contribue également au problème. Chaque fois qu’une institution demeure muette devant un cri de détresse d’un parent ou d’un ado victime de discrimination, elle contribue au problème. Chaque fois qu’une institution refuse de dialoguer avec un organisme ou un mouvement qui se crée pour faire avancer la justice sociale, elle contribue au problème.
Certains vœux antiracistes émis à droite et à gauche au courant des derniers mois par des gens de bonne volonté m’ont profondément blessé, en raison de leur manque d’action. Je vois tellement de souffrance causée par le racisme anti-noir et antimusulman chez mes amis proches ici même dans l’Ouest d’Ottawa. Combien de fois que les grands garçons de mes amis se font questionner par des autorités ou se font surveiller différemment dans des centres d’achat. Ça me met en colère. Je vois l’effet corrosif que cela crée chez ces jeunes…et chez les parents. Quand je dis aux parents que je veux porter plainte aux responsables, ils me disent de rester tranquille, de peur d’attirer des représailles. Ils ne veulent pas être vus comme des activistes et perdre une chance pour un emploi ou une promotion. Même des gens offrant des ateliers en compétences culturelles que l’on embauche pour traiter de ces situations ne peuvent pas toujours parler franchement et exprimer le vrai fond de leur pensée. Ils mettent de l’eau dans leur vin, déjà amer.
Lorsque nous parlons de lutte antiraciste, ce n’est pas théorique pour nous dans l’Ouest d’Ottawa. Les médias locaux ont rapporté l’incident d’un père qui se promenait avec sa fille dans un parc de l’Ouest de la ville au début de la pandémie et qui a été frappé au visage par un agent municipal. Il est important que les francophones des autres régions d’Ottawa connaissent où s’est passée cette affaire. C’était dans le parc Marlene Catterall, situé à quelque 10 minutes de marche de la Maison de la francophonie. C’est un parc très fréquenté par nos communautés de Ritchie, de Michèle Heights et de Foster Farms où demeurent beaucoup de francophones. Marlene Catterall est une géante de la francophonie de l’Ouest. Elle est membre fondatrice de la Maison de la francophonie et a siégé à notre conseil d’administration jusqu’à tout récemment. Pour nous de l’Ouest, c’est inimaginable qu’une telle agression sur une personne noire en présence de son enfant se passe dans un parc portant le nom d’une des nôtres qui a lutté toute sa vie contre le racisme et la discrimination systémique sous toutes ses formes. Nous avons réagi très fortement, chacune et chacun de sa façon. On ne cèdera pas notre quartier et notre ville à des gens qui semblent penser qu’Ottawa est le Mississippi du Nord.