Veille informationnelle : Différents scénarios étudiés par les économistes
Depuis le début de la crise liée à la COVID-19, les économistes canadiens et internationaux tentent d’établir différents scénarios pour évaluer les impacts potentiels de la pandémie sur l’économie et les finances des États. Privées de référents historiques et de données sur la durée de la crise, ces perspectives économiques et financières demeurent toutefois extrêmement incertaines et ne constituent pas des prévisions en bonne et due forme.
En l’absence d’un consensus parmi les économistes – outre le fait que les préjudices risquent d’augmenter selon la durée de la crise –, nous vous présentons aujourd’hui deux des principaux scénarios actuellement étudiés par les économistes au Canada. Il est important de mentionner que l’Alliance continue de suivre de près l’évolution de la situation, étant donné la volatilité de la conjoncture économique actuelle.
Une pause économique de six semaines
Au tout début de la crise, le Conference Board du Canada a publié ses habituelles prévisions de base pour les prochains mois, en supposant qu’une pause économique de six semaines (soit jusqu’au début mai) dans les secteurs d’activité non essentiels parviendrait à contenir la propagation du virus au Canada. Malgré cette courte durée, les répercussions négatives sur l’économie au deuxième trimestre seraient importantes, accentuant le ralentissement économique débuté à la fin de 2019 jusqu’au point de contraction. Selon ce premier scénario, la croissance du PIB réel ne serait que de 0,3 % en 2020, notamment en raison de la pandémie de la COVID-19, mais également de la chute mondiale des prix du pétrole – amorcée avant la crise, mais aussi accentuée par la période de pause. Cependant, si la crise se résorbe rapidement, le marché du travail ne devrait pas connaître un ralentissement marqué étant donné les pénuries actuelles de main-d’œuvre. De façon globale, ce scénario prévoit la création de près de 138 000 emplois cette année à l’échelle nationale, comparativement à 391 000 l'an dernier. Ainsi, le Conference Board anticipe que les nombreuses pertes d’emploi enregistrées au second trimestre seront compensées dès la seconde moitié de l’année 2020.
Le prolongement des mesures de distanciation sociale pendant l’été
Un second scénario, plus pessimiste, mais aussi plus répandu, suppose que les mesures actuelles d'éloignement physique et de confinement seront prolongées jusqu’à la fin août (pour un total de 24 semaines).
Dans ce scénario alternatif, le Conference Board du Canada estime que l’économie canadienne pourrait perdre plus de 330 000 emplois au cours des deuxième et troisième trimestres de 2020 (dont 230 000 dans le secteur des services), portant le taux de chômage à 7,7 %. L’analyse du directeur parlementaire du budget (DPB) fédéral s’attend plutôt à ce que le taux de chômage augmente à 15 % au troisième trimestre, avant de commencer à se résorber au quatrième trimestre.
Les deux institutions présentent également des données différenciées pour ce qui est de l’impact sur le PIB canadien. Selon le DPB, la croissance du PIB réel serait de -5,1 % en 2020, notamment en raison d’une chute de 25 % au deuxième trimestre. Il s’agirait alors de la croissance la plus faible jamais enregistrée depuis 1962. Pour sa part, le Conference Board du Canada estime que le PIB réel devrait se contracter de 1,1 % en 2020, en baisse par rapport à la croissance de 0,3 % prévue dans ses prévisions de base. Considérant que le PIB réel du Canada a diminué de 2,9 % en 2009, il convient de noter que les économistes ne peuvent prédire si la situation actuelle aura des répercussions plus ou moins intenses que la crise économique mondiale de 2008-2009.
Selon certains (dont les économistes en chef de la BMO et du Conference Board), si la pandémie COVID-19 est relativement contenue d’ici le mois de septembre, l’économie canadienne pourrait amorcer un rebond avant la fin de 2020. La demande accumulée pour les services et biens de consommation aidera la reprise de l'activité économique, alors que les dépenses des ménages devraient rebondir dès le quatrième trimestre de 2020 et en 2021. Pour d’autres, même si les mesures de distanciation physique sont levées progressivement, la réelle reprise économique s’effectuera sur un horizon de 12 à 18 mois, avec l’arrivée d’un vaccin.
Plusieurs variables en jeu
Outre la durée de la crise, plusieurs variables pourraient affecter les scénarios étudiés, dont :
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Les comportements des consommateurs pendant et après le confinement : pour le moment, les consommateurs canadiens et québécois sont plus pessimistes que jamais à l’égard du futur, notamment en raison de la pandémie, des fluctuations boursières actuelles, de la crise du pétrole (entre la Russie et l’Arabie Saoudite) et de la crainte d’une récession mondiale. Pour aider les Québécoises et Québécois à soutenir l’économie locale, le gouvernement Legault vient d’ailleurs de lancer le site Web du Panier bleu qui répertorie les points de vente locaux et provinciaux.
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Les mesures de soutien et de relance mises en place par les différents paliers de gouvernement : à lui seul, le gouvernement fédéral a déjà annoncé des mesures d’aide se chiffrant à 82 milliards de dollars, considérées comme la première étape de son plan de sauvetage. À titre comparatif, Ottawa et les provinces avaient dépensé un total de 54 milliards de dollars sur plusieurs années pour stimuler l'économie après la crise financière de 2008-2009.
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L’ampleur de la pandémie aux États-Unis : comme l’économie canadienne dépend largement du commerce et des échanges avec son voisin américain, la capacité des États-Unis à contenir le virus pourrait avoir des impacts majeurs sur la reprise économique au sein de nos frontières.
Il sera également intéressant de voir, au cours des prochaines semaines, les analyses découlant des différents scénarios de propagation du virus présentés par le gouvernement québécois hier après-midi à la presse parlementaire.