9 AVRIL 2021 | No 13

Un 3e dépôt gouvernemental famélique pour fêter un an sans convention

Le 31 mars 2021 marquait le premier anniversaire de l’échéance de la convention collective des 60 000 membres de l’APTS. La présidente du Conseil du trésor, Sonia LeBel, a choisi cette date symbolique pour présenter de nouvelles offres aux tables de négociation.

Pratiquement identiques à celles qui avaient été rejetées le printemps dernier, en particulier en ce qui concerne l’intersectoriel (salaire, retraite, droits parentaux et disparités régionales), elles n’apportent aucune solution pour mettre fin à la pénurie de main-d’œuvre qui pèse lourdement sur le réseau de la santé et des services sociaux (RSSS). Et il n’y a surtout rien pour maintenir son caractère public et freiner la privatisation des soins et des services qui, au final, coûteront beaucoup plus cher à la population du Québec.

Voici l’état des lieux des travaux aux tables intersectorielles et sectorielles.

Salaire

La «nouvelle» offre salariale présentée le 31 mars maintient des augmentations de 5 % sur 3 ans :

  • An 1 : 1,75 % d’augmentation, auquel s’ajoute un montant forfaitaire de 0,55 $ pour la période du 1er avril 2019 au 31 mars 2020 par heure travaillée pour les personnes salariées ayant passé plus d’un an au dernier échelon.
  •  An 2 : 1,75 % d’augmentation, auquel s’ajoute un montant forfaitaire 0,66 $ par heure travaillée pour la période du 1er avril 2020 au 31 mars 2021, offert à tout le personnel du réseau.
  • An 3 : 1,5 % d’augmentation.

Dans l’éventualité où l’économie du Québec se porte bien et que l’inflation est supérieure à 5 % à la fin de la période couverte par la convention collective en cours de négociation, une clause économique qui pourrait atteindre un maximum de 1 % bonifiera les augmentations proposées. En posant ces conditions cette clause ne fera que couvrir une hausse supplémentaire du coût de la vie. La ministre LeBel ne propose toujours rien pour combler l’écart entre les salarié·e·s du secteur public et les autres salarié·e·s du Québec.

Les délégué·e·s de l’APTS et de la FIQ, réuni·e·s dans leurs instances respectives, ont rejeté cette offre patronale le 6 avril dernier.

Du même souffle, les deux organisations syndicales regroupées en alliance lancent un avertissement à la présidente du Conseil du trésor: aucune entente de principe ne peut être envisagée sans assurer le rattrapage salarial et la reconnaissance de l’expertise de leurs 131 000 membres. Pour ce faire, elles revendiquent 12,4 % d’augmentation sur 3 ans, dont 7,4 en rattrapage salarial.

Est-ce parce que l’APTS représente en très forte majorité des femmes (86 % de ses membres) que le gouvernement nous fait de telles offres? Cela fait 20 ans que les augmentations salariales du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux sont en dessous de l’inflation, diminuant constamment son pouvoir d’achat. Tant et si bien que l’on en vient à parler d’une discrimination salariale lorsqu’on aborde la question de la rémunération de nos membres.

Dans les prochaines semaines, l’alliance APTS-FIQ va lancer une vaste campagne dont le thème est Payée au féminin et dont l’objectif est de dénoncer cette discrimination qui perdure.

payée au féminin

Une profession vaut autant qu’un métier. Mais pour le gouvernement de François Legault, le masculin vaut plus que le féminin.

Chaque jour, notre travail essentiel est payé au féminin. Il est temps que ça change.

VISUELS

En plus des nouvelles offres salariales, un nouveau dépôt sectoriel a également été soumis aux représentantes de l’APTS aux tables de négociation. Là encore, le gouvernement ne se donne toujours pas les moyens pour attirer et retenir la main-d’œuvre dans le RSSS. Si l’on constate de petites avancées, ces propositions patronales sont encore nettement insuffisantes pour éliminer la surcharge que vivent quotidiennement les professionnel·le·s et les technicien·ne·s du réseau.

Centres jeunesse

Au moment de la présentation de ces offres, la ministre LeBel prétendait avoir la marge de manœuvre nécessaire pour résoudre les problèmes d’attraction et de rétention de la main-d’œuvre en centres jeunesse. Mais qu’en est-il vraiment?

Dans son offre du 31 mars 2021, le gouvernement propose d’offrir aux membres de l’APTS de cette mission :

  • l’octroi d’une prime récurrente de 1,5 % du salaire horaire,
  • l’octroi d’une prime non récurrente de 2 % du salaire horaire, qui prend fin le 30 mars 2023, ou plus tôt si le gouvernement réussit à pourvoir les 500 nouveaux postes qu’il souhaite créer,
  • l’ajout de l‘équivalent de 500 postes à temps complet,
  • la mise en place de trois projets pilotes locaux portant sur la co-intervention dans le secteur psychosocial, sur le poste d’intervenant·e pivot et sur les communautés de pratique.

En contrepartie, l’employeur exige l’abolition de la prime de garde fermée, d’encadrement intensif et d’évaluation des signalements (que l’on retrouve à l’annexe 8 de la convention collective), soit le retrait du montant forfaitaire de 20,04 $ par semaine et de 5 jours de congé par année. De plus, il précise qu’une personne qui bénéficie des nouvelles primes proposées de 1,5 % (récurrente) et de 2 % (non récurrente) ne pourra pas bénéficier de la prime TGC (lettre d’entente no 17).

Ces incitatifs financiers sont nettement insuffisants pour attirer et retenir la main-d’œuvre dans les centres jeunesse et constituent de graves reculs pour plusieurs personnes salariées. Il est inconcevable que la ministre LeBel ait étalé ceux-ci sur la place publique en prétendant qu’ils régleront les problèmes dans les centres jeunesse!

L’APTS réclame quant à elle une prime de 5 % pour toute personne salariée qui travaille en centre jeunesse ainsi que l’octroi de 5 jours de congés mobiles par année. Elle demande également une prime allant de 5 à 10 % pour attirer et retenir les personnes salariées expérimentées, permettant ainsi de stabiliser les équipes de travail en centre jeunesse grâce à du personnel expérimenté.

À titre comparatif les personnes salariées qui travaillent en milieu hospitalier, à l’urgence ou aux soins intensifs, bénéficient d’une prime de 14 % de leur salaire. Il nous paraît tout à fait raisonnable que les personnes salariées qui œuvrent dans ce que l’on considère comme les soins intensifs des services jeunesse bénéficient d’un incitatif financier comparable.

Primes

Dans ce nouveau dépôt sectoriel, le gouvernement réitère son intention de reconduire la prime TGC ainsi que celle pour les personnes œuvrant en CHSLD (lettre d’entente no 18) jusqu’au 30 mars 2023. Ce faisant, il maintient une épée de Damoclès au-dessus de vos têtes jusqu’à la prochaine négociation car ces primes ne seront pas reconduites automatiquement lorsque la convention collective viendra à échéance. Le gouvernement Legault avait d’ailleurs menacé de les supprimer en mars 2020 si nous n’acceptions pas ses offres.

Afin d’éviter de répéter ce mauvais scénario l’APTS demande, entre autres, d’intégrer ces primes dans la convention collective et de remplacer les montants forfaitaires de ces dernières par une prime égale à un pourcentage du salaire (4 % pour la prime TGC et 2 % pour la prime CHSLD).

En ce qui concerne la prime de rétention pour les psychologues, la partie patronale propose de rehausser le palier 2 à 9 %, tandis que le palier 1 demeurerait à 4,1 %. L’APTS demande plutôt que cette prime bonifiée soit intégrée à l’échelle salariale.

Le gouvernement propose également de remplacer la prime de coordination par une prime de responsabilité de 5 %, offerte à toute personne salariée qui se voit confier la supervision et la responsabilité d’un groupe d’au moins 4 personnes.

Finalement, une prime de 2 % pour la supervision de stages serait également octroyée aux personnes salariées chargées d’assurer la supervision de stagiaires lié·e·s à un titre d’emploi sous la juridiction d’un ordre professionnel. Cette prime ne pourrait être cumulée à la prime de responsabilité.

Reculs du gouvernement sur les demandes patronales

On peut d’ores et déjà observer les effets de la mobilisation des membres de l’APTS sur les demandes patronales. Le gouvernement a en effet reculé sur certaines demandes jugées inacceptables en 2020 car elles n’apparaissent plus dans les offres du 31 mars 2021, à savoir:

  • l’obligation de travailler pendant 3 heures consécutives pour recevoir la prime de soins critiques,
  • des horaires allant jusqu’à 12 heures de travail dans une journée à temps régulier,
  • l’abolition de la clause vous garantissant 16 heures de repos lors d’un changement de quart de travail.

Devant l’obstination du gouvernement à ne pas bouger sur les enjeux cruciaux pour le personnel professionnel et technique du réseau, nous n’avons plus d’autre choix que d’envisager le recours à la grève pour répondre à l’intransigeance de Sonia LeBel, Christian Dubé et François Legault.

Lors du conseil général de l’APTS du 10 mars dernier, vos représentant·e·s syndicaux·ales ont voté à l’unanimité pour un mandat de grève d’au plus 10 jours. Cette décision n’a pas été prise de gaieté de cœur, mais elle se révèle nécessaire pour protéger vos emplois, votre santé physique et psychologique et, surtout, l’accessibilité et la qualité des services offerts dans notre réseau public.

Une tournée d’assemblées générales spéciales s’est amorcée le 29 mars dernier et se poursuivra jusqu’au 6 mai 2021. Les premiers résultats sont sans équivoque, vous êtes prêt·e·s à faire la grève si les offres du gouvernement restent aussi méprisantes. Il en va du bien-être de l’ensemble de la population du Québec.

DES QUESTIONS? ÉCRIVEZ-NOUS À NEGO2020@APTSQ.COM